Le ZOO d’Abidjan: Un patrimoine en quete de sa SOLUTION

Article : Le ZOO d’Abidjan: Un patrimoine en quete de sa SOLUTION
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11 mai 2013

Le ZOO d’Abidjan: Un patrimoine en quete de sa SOLUTION

Entrée du ZOO d'Abidjan (Photo Badra)
Entrée du ZOO d’Abidjan (Photo Badra)

Ce weekend, j’ai voulu faire comme tous les ivoiriens. Aller au Zoo d’Abidjan. L’annonce de cette intention, a fait rire plus d’un.

 – Quoi! Au Zoo? Qui va à cet endroit même ? Et pourquoi faire? S’est exclamé un ami avant de s’interroger.–  Tu va voir tes cousins ? M’a lancé un autre, en singeant.

Mais bon voila, mon projet, c’est mon projet. J’irai au Zoo. Et pour l’occasion, j’ai bien voulu partager mon plaisir avec un ami qui se trouve être mon petit ropero. Comme de nombreux Abidjanais, il passe et repasse devant ce lieu, sans envisager d’y faire un tour un jour de sa vie. Juste pour la curiosité. Juste pour voir ce qu’il n’a jamais vu. Un animal en vrai ou en captivité. Avec l’ami, nous y sommes allés, quand même, malgré les rires narquois et les langues sarcastiques, oubliant que découragement n’est pas ivoirien.

 – Au Zoo j’ai 100 francs. Annoncé-je à l’apprenti du Gbaka (véhicule de transport en commun à Abidjan).

– C’est 200 Francs mon vié à l’ère là  (à cette heure). Lança t-il sans me considérer. A cette heure, il a le choix du client. Donc il s’en fou.

Vous comprendrez, que le milieu du transport à Abidjan est assimilable à une bourse. Les tarifs montent, descendent, grimpent, bondissent…selon les positions du soleil. Le client n’est donc pas roi à certain moment du jour. Les transporteurs fixent les tarifs et les trajets selon leur gré et personne, personne de notre chère association dite des consommateurs ne réagit. De toute façon, si vous n’êtes pas content, si vous êtes trop fâché on vous dira ce qu’on dit aux usagers des bus de la capitale:

 – Achetez- vous une voiture ou marchez.

Mais bon, il ne s’agit pas de cela, mais de partir au Zoo, route d’Abobo par le Paillet. Le chemin le plus embouteillé. Toujours embouteillé à cause de l’absence des pannes de feux de régulation (nous y reviendrons) et malgré l’omniprésence de nos chers agents de contrôle et de régulation de la circulation. Ce jour, j’ai eu de la chance. La route sans feu tricolore, construite nouvellement, entretenue difficilement, est libre. Le Gbaka, cette carcasse roulante qui semble avoir échappé aux charognards vendeurs de ferraille de la Casse d’Abobo, réussit à me déposer devant le Zoo.

Vous connaissez le Zoo. Notre Zoo national. L’unique d’ailleurs. Il est entre les communes d’Adjamé, de Cocody et d’Abobo, perché sur une petite colline et supplantant les nombreux sicobois (bidonvilles) qui l’environnent et pour lesquels il constitue une véritable source d’approvisionnement en eau et en électricité.

Tickets d’accès en main, nous accédons au Zoo. Une petite pancarte avertit : « il est interdit de donner la nourriture aux… (blablabla blablabla) 10.000Fcfa». Le petit écriteau, sur lequel se trouve l’interdiction, parsème le jardin zoologique au point où, on imagine simplement, que le calligraphe a fait soit une promotion, soit un déstockage pour liquider ses bouts de contre-plaqué. Ce qui est sûr, personne dans ce pays ne respecte les interdictions et cela m’a rappelé le refrain d’une chanson du groupe rap Garba 50« Dans pays là c’est comme ça. On pisse sur les murs, on fume en public, on jette les ordures, on rackette, et puis ca va pas quelque part, dans pays là c’est comme ça». La preuve des jeunes donnaient bien à manger pour faire danser les Chimpanzés, sans être inquiétés.

S’il est vrai qu’une hirondelle ne fait pas le printemps, il y a des signes qui ne trompent pas. Ce jour, dans la cours, une ribambelle d’enfants acharnés sur un petit toboggan et une petite balançoire installés au centre de l’établissement. Ces enfants, des écoliers du primaire privé, venus, grâce à la volonté de leurs enseignants (souvent très mal payés) désireux de leur faire apprécier un échantillon de notre riche flore et faune, n’ont pas trouvé mieux que de s’offrir leurs propres spectacles. Leurs acharnements sur les objets de jardins d’enfants, dit long sur la qualité de l’attraction à laquelle ils s’attendaient surement.

Et effet, notre cher Zoo a du chemin à faire pour être à la hauteur des attentes des visiteurs. Loin de s’imaginer pouvoir retrouver les stars de la saga Madagascar 1,2…on s’attendrait au moins à voir l’essentiel. L’essentiel c’est qu’un établissement de ce genre, qui joue à la fois des fonctions culturelles, éducatives, économiques, touristiques…mette en évidence les richesses en terme de faunes de notre pays. Qu’au moins ont puisse y trouver des symboles de notre chère patrie.

Au Zoo d’Abidjan, les cages sont presque vides et l’effectif des pensionnaires a fortement diminué pour soit, à cause des crises que le pays a connu, dira t on, soit pour des raisons cadavériques ou d’évasion. La visite du Zoo, commence par la cage aux serpents tellement malfamés qu’ils n’ont plus la force de se dérouler. On a pu compter, si je me fie à ma vue d’ivoirien, quatre reptiles.

A gauche, les cages des oiseaux sont presque vides. Quelques unes, sous l’effet de la rouille et du au manque d’entretien, tombe, morceau par morceau. En dehors d’une sixaine de rapaces devenus stériles à force de ne pouvoir s’émouvoir et qui guettent la moindre occasion d’évasion, il y a dans la cours, deux (2) vieux paons se baladant, comme pour leur dire: débrouillez vous, nous on ne peut pas vous nourrir.

Nos petits cousins, ces  « mammifères majoritairement arboricoles appartenant à l’ordre des primates et formant un sous-ordre » (Encarta 2009) même s’il n’en reste qu’une dizaine avec en moyenne deux (2) par espèces, demeurent les plus excités. Normal non pour des singes. D’un coté, dans des cages, de petits singes s’agitent face, certainement aux gestes provocateurs de quelques petits malins du groupe des écoliers. De l’autre coté, la  grotte des chimpanzés, et celui des babouins. Des visiteurs s’attroupent, lancent des cris, demandent aux bêtes d’exécuter des gestes acrobatiques pour recevoir de la nourriture.

Dans le premier cas, on brandit des sachets contenant un liquide blanchâtre dit lait. On crie. Les quelques animaux de la portée, conditionnés à cause de la faim par certains sons, tintamarres, exécutent des sauts acrobatiques, puis tendent les mains (pardon les pattes) ou la bouche pour laisser entrer les goutes laiteuses lâchées par ces visiteurs.

Du couple de babouins, le technicien de surface (personnel d’entretien) qui s’est improvisé guide pour un couple, dit qu’ils sont des animaux très jaloux. Jaloux au point de s’attaquer aux hommes (sexe masculin) pour des femmes. Pour convaincre le couple, il s’est permis de mimer le rituel des amoureux en saisissant le popotin de la dame accompagnée. Le male babouin, pour montrer le ridicule de la pensée et de l’acte a balancé sa dernière déjection sur le monsieur, pour le réveiller et infirmer les théories saugrenues, d’un employer, mal payé en quête de la pitance du soir. Plus tard, le couple que nous avons rencontré, nous demandait où se trouvait le robinet.

Couple observant des babouins (Photo Badra)
Couple observant des babouins (Photo Badra)

 – On ne sait pas ho. Nous somme aussi des visiteurs comme vous, a répondu, mon petit.

Les cervidés, j’en ai compté 3 dont un faon. Mignon, minuscule et triste. Ces ascendants ont fait, la crise aidant, le bonheur de quelques sauces graines et la joie de clients de certaines tenancières des restaurants de fortunes environnant, spécialisés dans la vente de viande de brousse. Trois biches malheureuses dans un enclos où poussent à peine de l’herbe, quant on sait que des centaines de cobs de Buffon, de biches, d’antilopes, de céphalophes etc., gambadent dans nos forets et savanes, fuyant braconniers et prédateurs naturels.

J’ai vu dans l’étang, un hippopotame, je savais qu’il y en avait deux (2). Certainement, l’autre roupillait sous l’eau. Juste à coté, une population de crocodiles ou caïmans fortement diminuée. Les crocodiles ou caïmans du Zoo étaient numériquement supérieurs. Dans leurs sales étangs à l’époque, ils se superposaient, museaux ouverts, attendant que passe l’ombre d’un poulet. Aujourd’hui on compte aisément les têtes reptiles écaillées. Zut, j’oubliais, depuis que leur ancêtres ce sont attaqués à leur historique bienfaiteur à Yamoussoukro, ils n’ont de choix que de se tenir tranquille dans leurs bassins aux multiples fissures.

Etang des hyppopotames (Photo Badra)
Etang des hyppopotames (Photo Badra)

Entre l’espace des biches et celui des caïmans, nous avons passé la cage des tortues centenaires. La plus grosse, 150 ans, entend-ton, rescapée du hasard, trainent sa grosse carcasse, pendant qu’à coté, ses voisins ou voisines se bécotent tendrement.

Les tortues du Zoo ( Photo Badra)
Les tortues du Zoo ( Photo Badra)

En face, dans un vaste enclos, deux buffles aux airs affamés, qui ont du mal à se lever pour avaler les oranges et les pommes, qui leur sont jetés. Depuis quand un herbivore mange des oranges, des pommes quand il est tenaillé par la faim? Abidjan est rempli d’herbes drues pourtant. Il y a de cela une dizaine d’année, je racontais fièrement, que ces buffles étaient les mieux nourris, les plus épanouis. A cette époque, ils se pavanaient tous dodus et replets. La mort a visité le harem, et l’état actuel des survivants en dit long sur leur souffrance.

Une famille de trois malheureuses mangoustes, partage le dos de la cage aux vibrations cadavériques des hyènes. Deux animaux rayés se reposent. Pourtant cette espèce n’avait pas à se plaindre en tant que charognard dans un Zoo où la mort frappe régulièrement. Les carcasses sans vie des autres, leur permettaient de faire aisément ripaille. Comme quoi, la mort du cabri des uns, parfume la sauce des autres.

Je ne vous parle pas de la cage aux lions. La cage des rois de la forêt. Elle est vide et tombe presque sous le poids de sa vacuité. Déjà les lions qui y étaient, attendaient le jour de leur jour, affamés, faméliques, moribonds, chétifs, malades, qu’on pouvait compter de loin, leurs cotes. Se sont-ils échappés pour le casting de Madagascar IV ? Nada. Ils sont au paradis ou chez Hadès, en dessous des Tartares. Ils ont rejoint la demeure éternelle pour des siècles et des siècles.

Un détour à l’enclos des civettes. Il y a quelques viverridés aux origines mal précisées. Le temps a eu raison des plaquettes de présentation des bêtes. On a pu aussi constater que l’aire du fond, où il y avait un 3e éléphant, est transformée en un magnifique champ, où manioc et bananiers s’épanouissent grâce aux riches sédiments fécaux que le dernier pensionnaire a du laisser. A propos donc de cette espèce, symbole de notre Nation et de la fierté des ivoiriens, notre Zoo national possède qu’un seul pachyderme. Il est 1, unique comme le seul titre remporté à la Coupe d’Afrique des Nations. Effet du hasard ou signe d’annonciation, il serait est né en 1992 d’où son nom CAN. Logiquement un éléphant consomme environ 200 kg de nourriture par jour. Mais CAN, lui, est un vrai baoulé. Il vivote grâce au photographe des lieux. Ce dernier, lui permet de grignoter des morceaux  de pain godio, des mains de ses clients, lorsqu’il leur prend des photos. Pauvre CAN, du courage.

CAN et le photographe (Photo Badra)
CAN et le photographe (Photo Badra)

Je ne dis pas que dans notre cher Zoo, il ne reste rien. Loin de moi. Le cadre est convivial, reposant, l’air est frais, doux, pur. Et il se présente parfois comme l’endroit propice pour finaliser ou avancer dans des dossiers de cœur. Ici, les mots peuvent mieux pénétrer l’esprit, top en l’air de certaines de nos sœurs compliquées de chez compliqué. Je ne suis pas le seul à l’avoir pensé. Dans un endroit, quelques abonnés aux idylles de télénovelas, baladent leurs jouvencelles. Tout dépend de l’intention, mais là je ne dis plus rien je passe en disant que ce lieu sert au moins à quelque chose. (Mon gars si tu as ta go qui te fatigue, vas au Zoo. Tu n’y trouveras rien d’attractif, mais tu auras un cadre  poétique  pour lui dire que tu es fan juskaaa…)

Tout a surement une explication. Il y a 10 ans, ces lieux étaient pleins et offraient une attraction enchanteresse. Les différentes crises ont eu des répercutions sur cet endroit, malheureusement. Mon ami, n’étais pas déçu. Il a pu voir son premier éléphant. Mais, moi, j’étais désolé pour l’endroit et pour les animaux qui restent.

Après notre odyssée, nous avons voulu distiller nos émotions devant une boisson. On a encore poiroté devant le bar du Zoo. Personne n’a remarqué notre présence. On a du se contenter de salives et faire le point de notre visite devant un bon plat d’Attieke Poisson Fumé (APF) arrosé d’eau en sachets aux origines douteuses.

A la sortie, une note du Directeur des lieux avertit: Toutes tentatives de dénigrements sur le net, est passible de poursuites judiciaires. En plus d’offrir un spectacle médiocre, le client est interdit de commentaires. Voila comment nous avons prie cette note. Mais bon, adviendra que pourra.

Jah is love/

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Commentaires

Limoune
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Je ne suis pas fan des zoo. Mais la mention du ropéro m'intrigue. Dis-moi que sa fonction lors de cette sortie était la fonction "ami" et non ropéro. Un scout ne peut employer de ropéro, n'est-ce-pas ?

A.B. Ladji Coulibaly
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Je n'emploie pas de ropero. j'ai dit un ami qui se trouve etre mon ropero. La mention du terme visait simplement à mettre en evidence le texte de Emile Bela sur le metier de ropero

Limoune
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Yep ! Ca marche

Fallé YCOSSIE
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triste pour notre Zoo National, toute la population amaigrie, avec des prières pour pouvoir s'en échaper un jour de grâce divine. un seul éléphant au Zoo National du pays des éléphants. imaginons le Zoo de Bouaké alors.

A.B. Ladji Coulibaly
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Je n'ai jamais su qu'il y a un Zoo à bouaké ho.

guepard
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test ok

Ossène
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Après avoir lu ce billet qui décrit le zoo d'Abidjan, j'invite les autres lecteurs à méditer ces propos que les mystiques attribuent à Pythagore, une figure bien connue des philosophes: "Tant que les hommes se mettront à massacrer ( moi je dis "maltraiter") les autres êtres de règne inférieur, ils ne connaîtront pas la paix...".

Merci Sirabada!

A.B. Ladji Coulibaly
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Tu dis juste. n'oublies pas que les hommes aussi aiment la viande ho

Kany
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Je suis allée à Abidjan pendant les vacances d'été ... comme toutes nouvelles arrivantes j'ai visité le musée . J'ai été surprise presque aucun animaux, animaux limite squelettique lol . Apparemment le lion se serait enfuit durant la crise post-électoral

Tantie Evy
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J'aurais bien aimé quand même savoir le prix du billet d'entrée. Merci pour la visite guidée.

A.B. Ladji Coulibaly
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Ha han ca c'est la meilleure.
Le cout du billet d'entree varie entre 150 et 500 si je ne me trompe, selon que vous soyez eleve, etudiant, enfant de -10 ou 15 ans et adulte.
Je trouve d'ailleurs que les tarifs d'entree au Zoo d'Abidjan, sont assez interessant. Maintenant, ses administrateurs doivent faire preuve de beaucoup d'imagination.
Si vous voulez visiter le Zoo avec ICIELA; ha ha, nous vous offrons le billet. Merci de la visite

Kanon Hilaire
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Merci cher pour ce récit montrant la souffrance a la fois des animaux en captivité et des autorités à vouloir cacher cette souffrance au public.
Merci encore pour la dénonciation qui xertainement a contribué a faire prendre conscience aux autorités de la gravité de la situation.
Le résultat est connu aujourd'hui, le zoo a fait peau neuve. Même si la réouverture suscite des questions de fonds en termes rénovation des locaux ou de bien traitance des animaux, tu as le merite de nous faire découvrir la laideur du zoo.
Merci encore pour la prise de conscience .....